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Comprendre la logique et la technologie de Gravity (interview)

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Univers.

D’importants groupes médias français ont annoncé le lancement de leur alliance, Gravity, qui entrera en phase bêta en septembre. Gravity arrive avec une plateforme d’achat média (DSP) en plus de la gestion de données (DMP). Mais qu’en est-il de la technologie déployée et de l’organisation de cette nouvelle structure ? Comment va s’opérer ce partage de données et l’exploitation d’inventaires pour le compte des annonceurs ? Nous avons cherché des éléments de réponse avec celui qui équipe Gravity, la société mediarithmics, fournisseur de leurs plateformes DMP et DSP. Nous interrogeons Grégoire Fremiot, vice-président marketing de mediarithmics.

La data est l’élément central de l’alliance Gravity. Êtes-vous le seul à leur fournir la technologie pour le traitement des données?

Exactement. Le groupe de travail initié par Lagardère et les Echos-Le Parisien pour conceptualiser ce beau projet a lancé un appel d’offres avec plusieurs demandes. Nous avons commencé à échanger avec l’alliance il y a 4 ou 5 mois, leur projet était alors déjà très bien ficelé: créer une alliance non exclusive d’acteurs média possédant la data en propre pour avoir une taille suffisamment importante et répondre aux besoins des annonceurs et agences qui souhaitent du « reach ». La data au sein de Gravity est volumique mais aussi riche, avec des informations provenant du CRM ou de la navigation et permettant des ciblages socio-démographiques, socio-professionnels, lieu et moment de vie, intérêt, intention d’achat…  Cela permet in fine de cibler les bonnes personnes au sein de l’inventaire qualitatif de l’alliance Gravity sans pour autant mélanger les données de chacun. Les données étant un actif stratégique propre à chaque acteur, il fallait que la technologie aie la capacité de récolter individuellement et finement la data de chaque acteur avec une brique au-dessus que nous appelons la « cross-DMP » qui leur permet d’activer des campagnes croisant la data provenant de plusieurs sources sans pour autant la mélanger.

Cela veut dire que l’éditeur A membre de Gravity qui lance une campagne pourra utiliser des cookies et des données CRM d’un éditeur C membre de l’alliance et qu’à la fin il récupérera ses données de campagne mais pas celles de l’éditeur C?

Imaginons que l’éditeur A cherche à cibler des jeunes femmes CSP+. Cet éditeur A possède sur son site l’audience des jeunes femmes. Il lui faut en plus le critère CSP+, trait caractéristique des lecteurs de l’éditeur C. Il pourra donc activer via une cross-DMP et un DSP Gravity fournis par mediarithmics ses propres données avec celles de l’éditeur C pour cibler sa campagne sans jamais récupérer les données de l’éditeur C. À noter que l’activation sera complètement anonymisée. Enfin, le dernier module demandé par l’alliance Gravity est l’attribution. Concrètement cela veut dire: je suis l’éditeur A, je mène une campagne avec la data de Gravity (la cross-DMP), je gagne des impressions sur l’inventaire Gravity, il y aura une rémunération média sur ce que j’ai diffusé sur les sites x, y, z membres de l’alliance et il y aura une rémunération data. Cette dernière dépendra donc du ou des contributeurs de ses impressions. À chaque impression on regardera les propriétaires des données qui ont servi à cibler la campagne et on leur reversera le revenu automatiquement et en temps réel.

C’est le principe même d’une alliance: tout le monde contribue, tout le monde gagne. C’est cela l’idée?

Une structure juridique a été créée. Elle est détenue par les membres fondateurs actionnaires de l’alliance. Cette gouvernance sera amenée à s’élargir par des augmentations de capital et l’entrée de nouveaux actionnaires membres de l’alliance Gravity. De nouveaux membres pourront aussi rentrer sans pour autant devenir actionnaire. L’idée est de former une alliance premium la plus large possible. Un membre de l’alliance Gravity tire plusieurs bénéfices: il gagne un revenu data quand d’autres membres utilisent sa data, mais il voit aussi plus d’acheteurs sur son propre inventaire. Enfin, il a la capacité de mieux délivrer ses campagnes tout en restant dans un environnement qualitatif en reciblant ses segments chez les autres éditeurs. Il peut grâce à Gravity et à sa taille critique rentrer dans la « cour des grands ». Gravity est déjà à 44%  de reach quotidien et va très vite dépasser les 50% parce que d’autres vont arriver.

Est-ce que les inventaires seront mutualisés au sein de l’alliance?

Les acheteurs au sein de Gravity achèteront de l’inventaire Gravity. Libre à eux bien entendu de choisir de faire une campagne uniquement sur leur propre inventaire s’ils le souhaitent.

Est-ce que Gravity engendra la fin de La Place Média et d’Audience Square?

Non. Gravity se positionne dans une dimension achat média et data DSP là où Audience Square et La Place Média se développent dans l’univers de la « supply » /SSP. Le projet Gravity a selon mon point de vue une très forte sophistication par rapport à d’autres belles initiatives qui ont été lancées en Allemagne on en Israël, ou encore dans la vidéo aux États-Unis. Les atouts de Gravity sont de garantir à chacun de rester maître de son actif data. Le fait d’être dans un système de jardin privatif (walled garden) rend impossible pour les intermédiaires de récupérer la data sans l’acheter. Aujourd’hui, la seule façon de se protéger dans le digital consiste à conditionner l’achat à son DSP et à contrôler ce qui s’y passe, comme le font Google, Amazon ou Facebook.

Aujourd’hui un acheteur qui veut acquérir de l’inventaire en France peut très bien passer par Google (DBM). Est-ce que les membres de Gravity vont quitter Google ?

Non, Gravity est un projet qui vient en plus des régies et technos existantes. Il y aura donc toujours des achats via DBM sur les SSP des régies. Non seulement les régies continueront d’exister mais leur puissance deviendra potentiellement plus forte puisque elles aussi pourront utiliser Gravity.

Vous existez depuis cinq ans en France et vous proposez une offre globale, de la collecte à l’attribution. Comment expliquez-vous votre développement assez rapide ces dernières années?

Il est vrai que cette annonce nous rend plus visible. L’histoire de mediarithmics est celle du travail innovant de Stéphane Dugelay, son fondateur, qui a toujours considéré que pour faire du data marketing il fallait pouvoir s’appuyer une offre full stack DMP + DSP + DCO + Analytics. La data se transmet souvent mal entre des technologies différentes, chaque technologie étant complexe à intégrer entraînant des problèmes de latence et de déperdition de data. Google, Facebook, Amazon ou Criteo obtiennent de très bonnes performances en programmatique notamment parce qu’ils ont développé des technologies full-stack: la collecte, l’activation, la bannière personnalisée, la mesure, l’attribution. Notre full stack est utilisée par une vingtaine d’éditeurs et d’annonceurs. Nous avons commencé avec des clients assez matures qui avaient déjà testé d’autres solutions et avaient des besoins clairs pour aller plus loin.

Propos recueillis par Luciana Uchôa-Lefebvre

 

(Images: Shutterstock.)

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